Entre Deux Eaux

Entre Deux Eaux

Expertise en management stratégique de projets complexes dans le domaine de l’eau

Entre Deux Eaux RSS Feed
 
 
 
 

Mathématiques

Dilemme du prisonnier ?les daltons

Aujourd’hui où nous nous trouvons dans la fameuse région du GAP, (voir précédent article), projet que nous étudions depuis quelques semaines, nous voulions vous faire partager un peu de mathématiques.

Qu’est-ce que les mathématiques ont à faire avec l’eau, me direz-vous ? Eh bien, beaucoup de choses. Tout d’abord, depuis le début de notre recherche, nous nous sommes rendus compte qu’il existe des théoriciens de tout et sur tous les sujets. Certains chercheurs ne trouvent rien d’autre à faire que de mettre des chiffres sur des situations, sur des attitudes, sur des comportements ou même sur des décisions. Ainsi, sur le sujet de l’eau par exemple, il existe des formules pour calculer la négociation, la résolution de conflit, les degrés d’impact des infrastructures sur la population, et ainsi de suite. Vous seriez effrayés de savoir que des savants ont établi des cartes cognitives de nos cerveaux afin de savoir quelle décision nous serions plus susceptibles de prendre dans telle ou telle situation. Cependant, ces formules incompréhensibles pour le commun des mortels sont plus qu’utiles lorsqu’il s’agit de gérer des situations, ou des projets, qui impliquent plusieurs pays, des centaines de milliards de dollars, des milliers de personne et des équilibres géopolitiques instables. Alors on dit « Merci » à ceux qui ont inventé des choses qui ressemblent à ça :

 v(C \cup  Z) \ge v(C) + v(Z) \qquad (C \cap Z = \emptyset)

 (1) \quad x_i > y_i \quad \forall i \in S \quad (2) \quad \sum_{i\in S}x_i \le v(S)

Nous ne sommes pas fans de mathématiques, rassurez-vous, et c’est pourquoi je pense que ce petit exemple vous plaira autant qu’à nous. La théorie que nous avons choisi de vous expliquer aujourd’hui s’appelle « la théorie des jeux ». Ludique, elle ne l’est que par le nom. Nous ne vous exposerons pas la théorie originale de ses auteurs (John Von Neumann, Oskar Morgenstern ou John Nash, 1944). Heureusement que d’autres auteurs, soucieux de diffuser leur passion à leurs contemporains (et à nous par la même occasion !), en ont fait une métaphore : le dilemme du prisonnier.

La théorie des jeux permet d’étudier des situations dans lesquelles plusieurs personnes doivent faire des choix qui auront des conséquences sur les autres personnes. Exemple : la Turquie veut développer la région d’Anatolie Orientale qui est sous-développée par rapport au reste du pays. Cependant, construire des barrages entraîne une diminution du débit pour la Syrie et l’Irak.

Cette théorie va analyser les comportements des protagonistes (Turquie, Syrie et Irak) pour mettre en évidence des stratégies optimales (situation dans laquelle le Tigre et l’Euphrate sont partagés équitablement entre les 3 pays).

Les jeux peuvent être à somme nulle ou à somme non-nulle. Un jeu à somme nulle est un jeu dans lequel tout ce que gagne l’un est perdu par l’autre (exemple : le poker). Au contraire, un jeu à somme non-nulle peut être profitable ou dommageable pour plusieurs acteurs. Dans notre cas, si la Turquie décide de couper l’eau à la Syrie pour satisfaire ses besoins en irrigation et que la Syrie bombarde et détruit ces installations, le jeu sera perdant pour tous. Au contraire, si un accord trilatéral est signé, les 3 pays pourront partager les bénéfices de la ressource et maximiser leur agriculture, industrie et irrigation. Le jeu sera alors gagnant pour tous. Pour nos exemples, nous prenons bien entendu des situations extrêmes, n’y voyez là aucun jugement de teneur politique ou économique. Aujourd’hui (et rien qu’aujourd’hui), nous sommes des mathématiciens.

Le meilleur (et le plus parlant) exemple d’un jeu à somme non-nulle est le dilemme du prisonnier. Nous appliquerons cet exemple afin de prouver que dans les situations complexes telles que le partage de la ressource en eau, coopération vaut mieux que baston. Cependant, cet exemple est utilisé dans de nombreux domaines tels que la politique, l’économie, l’environnement ou même la vie de tous les jours. Je me suis surprise l’autre jour à me l’expliquer mentalement dans une situation où 2 automobilistes ne voulaient pas se laisser la priorité. Sans aller jusque là, je vous propose d’écouter cette petite histoire :

Deux complices sont arrêtés par la police pour un délit commun. Ils sont placés dans 2 cellules séparées sans aucun moyen de communiquer l’un avec l’autre (vous connaissez la police, ils ne sont pas tendres…). Un agent vient les voir chacun à leur tour et leur fait la même proposition :

è Si tu ne balances pas ton complice et qu’il ne te balance pas non plus, vous irez chacun 6 mois en prison ;

è Si tu te tais mais que ton pote te dénonce, tu fais 10 ans et ton pote est libre ;

è Si tu dénonces ton collègue et qu’il te dénonce aussi, vous prenez chacun 5 ans.

Dans la tête de chacun des détenus, c’est la pagaille. On peut résumer les 3 propositions ainsi :

Il me dénonce

Il se tait

Je le dénonce

5 ans

0

Je me tais

10 ans

6 mois

Chacun a 2 choix : dénoncer ou se taire.

Si mon complice se tait, 2 possibilités : Je le dénonce -> je sors

Je ne le dénonce pas -> je prends 6 mois

Si mon complice me dénonce, 2 possibilités : Je le dénonce -> je prends 5 ans

Je ne le dénonce pas -> je prends 10 ans

Dans les 2 cas, j’ai intérêt à le dénoncer (dans un cas je sors au lieu de prendre 6 mois et dans l’autre cas je prends 5 ans au lieu de 10).

En réalité, la meilleure solution pour les 2 serait qu’aucun ne dénonce l’autre. Cependant, lorsque chacun réfléchit individuellement, il prendra la moins bonne solution pour l’ensemble parce qu’elle lui semblera la meilleure pour lui-même.

Dans le cas du partage des eaux du Tigre et de l’Euphrate, c’est un peu pareil. Si les trois pays signent un accord de partage équitable des eaux, la situation sera bénéficiaire pour tous. Cependant, si chacun réfléchit individuellement, les ressources risquent d’être dégradées, gaspillées et perdues pour tous. Cette théorie n’est pas applicable directement à nos 3 pays car ils ne bénéficient pas tous les 3 d’une situation initiale équivalente. La Turquie étant en amont, elle a le choix de réguler le débit, choix que les 2 autres pays n’ont pas. Mais nous ne rajouterons pas d’autres paramètres à cette théorie, nous sommes déjà allés suffisamment loin pour aujourd’hui.

En espérant que ce petit aparté mathématique vous aura plu, nous vous promettons que notre prochaine intervention sera moins technique avec une newsletter toute en images afin que vous voyiez, vous aussi, les visages, les pistachiers, l’Euphrate et toutes ces choses qui elles aussi font d’un projet sur l’eau sa complexité et son unicité.


Warning: is_writable() [function.is-writable]: Unable to access /cache/php.err in /mnt/153/sdb/c/5/entre2o/wp-includes/wp-db.php on line 200

Leave a Reply

Notre Bibliothèque

Inscrivez-vous à la newsletter

E-mail:

S inscrire
Se désinscrire

Photos

Mt Nebo - Coucher de Soleil 13.JPG
Wadi Mujib - vue sur la vallée 4.JPG

Films