Rencontres
Couchsurfing - Introduction à la culture locale
Novembre 2008, départ J- 15, nous continuons notre valse incessante d’allers-retours sur Paris. Nous accumulons les rendez-vous pour les derniers préparatifs et surtout pour arrondir notre budget. Nous avions déjà à l’époque l’habitude de jouer les sans domiciles fixes et atterrissons chez Arthur :
- Hi, my name is Kate and this is Jenny. We are from Oregon in the US.
- Hello! Euh, Arthur, c’est qui? Tu les héberges gratuitement? Mais tu ne les connais pas ? C’est quoi ce truc, Couchsurfing ? »
C’est à ce moment là qu’il faut s’accrocher. Cette anodine rencontre va changer l’ensemble de notre voyage. Nous ne sommes plus des « sans domiciles fixes à la recherche d’un toit », nous sommes devenus des « couchsurfers » et ce nouveau titre va grandement simplifier notre quête de pied-à-terre et même plus encore.
Couchsurfing c’est quoi ?
Littéralement traduit de l’anglais, il s’agit de « surf de canapé », mais en y regardant de plus près, ça ressemble d’avantage à un échange d’hospitalité.
Concrètement, via une plateforme internet, on demande à des membres du site si l’on peut être hébergé chez eux. Le site rassemble aujourd’hui plus d’un million de membres et offre par conséquent un certain nombre d’opportunités. Les concepteurs américains ne se sont pas regardé le nombril et ont ouvert l’accès à tous. Après une lente propagation sur le continent américain, le terrain de jeu des rencontres a désormais pris une dimension planétaire, et c’est là que ça devient intéressant.
Mode d’emploi.
La première étape pour intégrer le réseau est de se créer un profil sur le site www.couchsurfing.org en détaillant votre personnalité, expériences de voyage, rencontres, goûts… Vous créez ainsi votre carte d’identité pour ensuite interagir avec les autres membres. Puis, à la fin de cette courte présentation, vous choisissez votre statut :
- En voyage,
- Disponible pour un verre ou un café,
- Disponible pour héberger quelqu’un.
Vous créez alors une seconde carte d’identité, celle de votre domicile cette fois. Pas besoin d’exposer votre goût pour Stark et votre collection de chouettes, il s’agit plus d’expliquer le cadre dans lequel vous vivez : plus ou moins loin du centre, avec des accès aux transports en commun, la proximité de supermarchés, que vous ne supportez pas les chats, que votre maison est non fumeur, que vous ne pouvez héberger que 18 personnes à la fois, que votre couch disponible est dans le salon, que vous n ‘accueillez que des couples le mercredi soir, que…
On se lance
Le départ est dans 3 jours, nous avons des amis pour nous recevoir lors de nos premières escales (merci Elisa, Laetitia, Kant et Elena) mais personne à Budapest. Nous nous connectons sur le site et débutons la recherche : Budapest, 2 personnes minimum, a un couchage de disponible (peut être, oui, certainement). ENVOI. Nous faisons alors simultanément la connaissance de 210 Budapestois. Nous commençons la lecture de leurs profils et nous nous rendons rapidement compte que chaque profil dispose de références. Elles ont été rédigées par des personnes qui ont offert l’hospitalité, ont été hébergés ou juste rencontré cette personne à travers le « chat » ou lors des nombreux Couchsurfing meetings qui sont organisés dans leur ville. En plus du profil, elles permettent de découvrir un peu mieux la personne au travers des expériences racontées et caractérisent aussi l’ancienneté et le dynamisme de la personne pour le site. Nous sélectionnons 3 profils avec lesquels nous semblons avoir des points communs et nous leur envoyons une demande par mail que nous essayons de personnaliser au maximum pour justifier notre choix.
Nous sommes chanceux, Marc (espagnol) et Andrea (italien) nous attendent pour notre arrivée, puis nous déménagerons chez Akos (hongrois) pour les 3 derniers jours de notre séjour.
C’est parti !
Nous arrivons à la gare centrale de Budapest, récupérons rapidement un plan à l’office du tourisme et, avec les informations envoyées par Andrea, nous rejoignons leur appartement en enjambant les grands boulevards de la capitale, la tête dans les décorations de Noël qui garnissent les monuments. Nous sommes vite à notre aise dans ce bordel organisé qu’est leur studio et dans lequel se côtoient écossais, hongrois, italien, espagnols, français et statue d’Hermès. C’est à ce moment là que nous prenons la mesure du site. Il ne s’agit pas simplement de trouver un hébergement gratuit, c’est une formidable opportunité de rencontrer des locaux et de s’immerger un peu plus dans la culture du pays.
Cet enchantement nous suit toujours après un an de vagabondage et de rencontres. Lorsque nous voyageons en auberge de jeunesse, nous avons également cette opportunité de découvertes et d’enrichir notre voyage de rencontres, mais nous nous cantonnons à un voyage avec d’autres voyageurs.
Couchsurfing nous donne l’opportunité de partager les habitudes de nos hôtes, de découvrir la ville à travers leur mode de vie, leurs coutumes. Qui nous aurait conduit jusqu’à ce petit boui boui qui fait les meilleurs Iskenders de la ville, qui nous aurait montré ce bar complètement fou au milieu de la forêt, qui nous aurait raconté le son des bombes qui tombaient à coté de son oreiller ? … Le Routard, Le Lonely Planet ?
Les expériences ont été nombreuses, variées et toutes positives. Nous nous rappellerons :
- D’un rassemblement Couchsurfing où le temps d’un weekend, palestiniens, jordaniens, syriens et israéliens se sont côtoyés en toute simplicité.
- De Branislav et Ivana, à Novi Sad, Serbie, qui nous ont offert tous ce qu’ils avaient. Nous partagions un 10m2 à 5. Eux sur leur canapé lit, et nous partagions le reste de la surface disponible avec Adrian (Mexicain),
- De Selmo et Jo qui nous ont accueillis 1 mois et demi en discontinu dans leur maison à Amman. Un camp de base pour ensuite rayonner dans la région. Une autre semaine passée avec eux à Bangkok a fini de souder notre amitié,
- De Nizam au Bangladesh, qui nous a hébergés dans son entreprise à Dhaka pendant 15 jours. Une chambre digne d’un hôtel 4 étoiles agrémentée d’un petit déjeuner et d’un chauffeur à notre disposition. Trop de luxe d’un coup !
- Daniel rencontré à Alep en Syrie, voyageur plume avec qui nous avons partagé un bout de route en compagnie de 4 autres couchsurfers. L’Autostop à 7, c’est possible en Syrie ! De retour chez lui à Sao Paulo, nous avons maintenant la chance de découvrir la folie brésilienne avec lui.
- …
Nous avons fait connaissance d’autres voyageurs qui étaient hébergés en même temps que nous. Nous échangeons sur nos voyages respectifs et cela nous renvoie forcement à notre propre condition. Nous faisons un tour du monde, c’est une expérience unique, mais il y a mille manières de la vivre. Il est difficile au début de se fixer sa ligne directrice, et la confrontation avec ces autres routards nous donne d’autres idées, mais nous ne pouvons pas tout faire. Ce fut peut être la chose la plus difficile à accepter au départ. Chacun le fait à son rythme et suivant ces envies.
On retrouve alors plusieurs catégories de personnes :
- Les touristes (même si nous le sommes tous au final) : ils viennent pendant 1 ou 2 semaines dans la région et souhaitent voir un maximum de choses pendant ce temps imparti,
- Les « Backpackers » : ils voyagent sur des durées plus longues et se fixent des objectifs de parcours, « nous allons jusqu’ à Sydney et puis on rentre »,
- Les « plumes » : ils n’ont pas de budget, pas de projet, pas d’itinéraire ou de contraintes de temps, ils vont aussi loin que le vent les mène et que leur porte-monnaie le leur permet,
- Les inclassables : comme ce couple de japonais qui voyage pour 4ans travers le monde avec l’objectif de visiter tous les pays. 4ans pour 216 nations, cela fait environ 6 jours par pays, peu importe qu’il s’agisse de la Russie ou du Luxembourg !
Un peu d’humanité
L’usage du site dépend des envies de chacun, comme tous les autres sites de réseau de ce type. Cela reste un outil et chacun peut en faire ce qu’il veut et à son rythme. Héberger tous les soirs, une fois par mois, ne faire que surfer, accueillir uniquement les ouzbeks de plus de 67 ans, à vous de choisir !
Nous avons profité de la gentillesse de couchsurfers depuis près d’un an et souhaitons vraiment maintenant pouvoir rendre la pareille. Ce seront de nouveaux visages pour beaucoup mais ça ne fonctionne pas sur le principe du donnant-donnant. Je t’héberge aujourd’hui mais bien malin celui qui connait l’identité de mon futur bon samaritain !
De la même façon que pour l’auto stop, ces initiatives qui nous rapprochent les uns les autres laissent espérer qu’il y a encore quelque chose de bon à retirer de l’humanité.
Dans le même style
Hospitality club – autre site d’echange d’hospitalite qui fonctionne sur la meme base de confiance que CS - http://www.hospitalityclub.org/
Wwoufing - littéralement World Wide opportunities in organic farming est une autre façon de voyager, de vivre des moments d’échanges humains uniques. Né en Angleterre dans les années 70, le wwoofing repose sur un échange « donnant-donnant ». Le woofer aide bénévolement dans une ferme biologique en échange de quoi il est logé et nourri. - http://www.wwoof.fr/
Chez l’habitant – Parfois nos aventures nous ont permis d’entrer dans l’univers de parfaits inconnus rencontrés sur notre route. Au Moyen Orient, les journées commencées en stop finissaient toujours autour d’un bon repas chez notre sauveur matinal. Notre passage dans cette région, a pour cela été incroyablement riche et chaleureux. Le « bakchich » n’est en réalité pas cette technique sournoise de s’assurer les largesses des uns mais une tradition arabe d’offrir des cadeaux aux étrangers de passage. Nous repartons ainsi de Raqua (Syrie) alourdis par un magnifique service à café de 12 tasses et coupelles assorties. Nous devrions tous aller à la rencontre de ces populations plutôt que de juger leur pays à travers les grands titres de la rubrique internationale.
- Les kurdes ne sont pas les terroristes sanguinaires que nous présentent les turcs,
- Les syriens ne sont que trop mal représentés par Bashar,
- Combiens de palestiniens sont ils vraiment actifs pour le Hamas ?
- Les bédouins ne sont pas des voleurs de chèvres mais certainement les personnes qui vivent le plus en harmonie avec leur environnement : naturel ou humain.
A vous de jouer !